I missed you quietly

 

Installé dans la chambre de Yeong Su, première chose faite en arrivant dans cette pension, elle essaye d’imaginer, à ses côtés, le futur et le fait de vivre dans un certain confort, sans se soucier de l’argent, de vivre comme elle le désire, de la manière qu’elle le souhaite. Ce sont des questions pertinentes, malgré leur jeune âge, car il faut y penser. Toujours y penser. Surtout que personne ne sait de quoi demain est fait et qu’il peut être surprenant. « Tu crois vraiment que je pourrai vivre comme je le souhaite Oppa ? » dit-elle doucement, regardant le plafond d’un air rêveur. « Tu crois que le monde va changer ? Moi je pense qu’il change bien trop vite et je ne sais pas si je vais pouvoir le suivre ». Et si surtout elle va pouvoir faire ses propres choix de vie. Elle pensait devenir une grande ballerine, renommée du monde entier, mais son rêve s’est déjà heurté à la réalité. « Est-ce que tu penses Yeong Su, que toi, tu ne vas pas t’inquiéter de demain ? ». Ce n’est pas possible et elle le sait. La vie n’est pas facile et davantage pour ceux qui n’ont pas les moyens. Alors pourront-ils vraiment atteindre leurs objectifs de vie ? Pourront-ils vraiment ne pas s’inquiéter du futur ? Elle doute. Mais elle veut bien y croire. Juste un peu. Mais tant qu’il est là, tant qu’il est prêt d’elle, tout ira bien n’est-ce pas ? Elle aura toujours son meilleur ami, son meilleur soutien. « Je sais que tu viendras me sauver quoiqu’il arrive » dit-elle en le regardant, souriant. « Tu sais que tu es bien le seul homme, après mon père, en qui j’ai confiance ». Et c’est la triste réalité. Même à 16 ans elle se méfie des garçons et encore plus alors qu’elle est en pleine croissance et que les hormones sont bien présentes, autant pour elle que pour les hommes. Elle sait que c’est en cette période que les garçons deviennent un peu trop curieux.


« Oh si tu savais Yeong Su. Les Etats-Unis c’est un tout autre monde. J’ai l’impression qu’ils sont bien plus avancés que nous, et puis, ils ont des vêtements tellement à la mode. C’est tellement beau là-bas », ses yeux pétillent d’un bonheur extrême pour s’assombrir la seconde d’après, réalisant qu’elle n’y retournera certainement plus jamais. « Je n’hésiterai pas à venir dans ta chambre, mais je doute que la directrice du pensionnat soit en accord avec ces manières de faire. Elle a l’air particulièrement stricte et ne semble pas vouloir mélange garçons et filles », elle pousse un petit soupir de désespoir. Elle peut comprendre ces méthodes archaïques et elle sait qu’à 16 ans ça ne se fait pas, pour une fille, de rester sans la chambre d’un garçon. Ce n’est pas correct. Pas encore du moins. « Tu crois que je peux tout de même me reposer quelques minutes dans ta chambre ? Je pense que j’ai besoin de repos mais que je ne me sens pas encore assez à l’aise pour dormir dans ma chambre ». Elle sait qu’elle ne devrait pas. Pas avec Yeong Su. Pas lui. Pas alors qu’elle nie avoir des sentiments pour lui, essayant de les balayer, gardant en tête qu’il n’est que son meilleur ami. Elle hésite une fraction de seconde à revenir sur ces mots mais ça paraîtrait bien trop étrange, pas habituel alors qu’elle essaye de l’être. Elle se met alors à rire, « promis je ne ronflerai pas et je ne t’embêterai pas trop longtemps. Juste quelques minutes ». Parce que bien sûr, il doit rester dans la pièce, pour qu’elle puisse réellement se reposer. Parce qu’elle a besoin de savoir qu’il est là. Pour la protéger.

Nos cicatrices ont le mérite de nous rappeler que le passé n’a pas été qu’un rêve.

Pando

« Je suis certain que tu pourras vivre comme tu le souhaites. Je ferai tout pour que tu vives comme tu le souhaites. » dit Yeong Su, en souriant, avec l’assurance d’un homme plus âgé. Au fond, il n’était pas aussi sûr de lui. C’était toujours difficile de l’être lorsqu’on parlait du futur. La seule chose qui était certain pour lui sur le moment, c’était qu’il ne voyait qu’elle et que dans l’instant présent, il était sans aucun doute prêt à tout pour elle, pour qu’elle vive le bonheur qu’elle mérite. « Le monde change et il continuera de changer mais je suis certaine qu’avec ton caractère, tu sauras t’y faire une place qui te permettra de tout suivre et de tout réussir. Moi, c’est différent. Je suis beaucoup plus effacé, en retrait. Peut-être que je ne survivrai pas aussi bien à tous les changements du futur. » Il n’avait jamais eu confiance en lui. Il s’était toujours trouvé trop fade et invisible. Il n’était pas le genre de garçon à se plaindre de ses complexes et à les confier si facilement ; mais il était avec Mi Nah, et à elle, il pouvait tout lui dire. Elle savait, de toute façon, presque tout ce qu’il y avait à savoir. Si ce n’était ce qu’il ressentait pour elle, elle savait tout. Il eut un doux sourire au rappel de Mi Nah. Il savait mieux que n’importe qui qu’il était le seul garçon en qui elle avait confiance en dehors de son père. Il savait mieux que n’importe qui combien sa position de meilleur ami était précieuse pour eux deux, et importante pour les repaires de Mi Nah. C’était le fait qu’il ne le sache que trop bien qui l’avait toujours empêché de se déclarer. « C’est justement parce que je serai là pour te sauver que tu n’as pas besoin de te prendre trop la tête sur le futur. Vis juste comme tu le sens, en faisant ce que tu aimes. C’est cette image de toi, heureuse, croquant la vie à pleine dent sans se prendre trop la tête, que je veux voir. », lui confia t-il. C’était ce qu’il pensait du plus profond de son coeur.

Il fut content qu’elle ait de bons souvenirs aux États-Unis. Il n’avait pas pu être avec elle pendant la majorité de son séjour là-bas mais ça lui suffisait de la voir avec des étincelles dans les yeux rien qu’à la pensée de ce pays-là. Il se mordit les lèvres ; ce que dit Mi Nah n’était pas faux. Si pour eux, dormir dans le même lit n’avait rien de malsain – encore que ces derniers temps, il était un peu moins à l’aise avec ça, ça l’était sans doute aux yeux de quelqu’un d’autre. « On essaiera de négocier pour que tu viennes quand même. » Il suffisait de ne pas se faire prendre, aussi. Elle n’était pas toujours là, à les surveiller… Il hocha la tête en souriant. « Bien sûr, repose-toi. Je ne pense pas qu’ils viendront te déranger, ils savent qu’il ne se passera rien quand tu es avec moi, après tout. » Il se faisait confiance, il savait faire taire les battements de son coeur quand ils se faisaient trop bruyants et trop rapides. Il l’avait fait pendant longtemps. Il rigola un peu. « Tu ne m’embêtes pas, de toute façon ! » Et même si ça paraissait évident, il avait trouvé nécessaire de le repréciser.